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08 mai 2020

Affaire Angela Kpeidja et harcèlement en milieu de travail : Voici les actions que doit mener le PR Patrice Talon pour déraciner le mal


-          Par Octavio Diogo

Elle n’en pouvait plus ! Angela Kpeidja ne supportait plus le harcèlement sexuel et moral qu’elle subissait à l’ORTB et elle l’a exprimé le 1er mai 2020 sur les réseaux sociaux, à l’occasion de la fête du Travail. La mauvaise conduite était devenue la norme, dans des maisons de production audiovisuelle et au sens large dans l’administration publique et les entreprises privées, avait exaspéré l’ancienne Chef Desk Santé de la Chaine nationale. Au lendemain de cette dénonciation, la déferlante vague de témoignages complémentaires par vidéos ou écrits d’anciens animateurs ou acteurs des médias locaux, anciens stagiaires dans l’administration publique et bien d’autres, ont fait le tour de l’internet pour enfoncer le clou et déballer sur la place publique, les dessous du monde des médias, tout comme celui de l’administration.

Pour confirmer que rien ne lui échappe, le premier magistrat du pays, le Président Patrice Talon a rencontré quelques jours plus tard dame Angela et les responsables de l’Office incriminé. Dans son adresse sur Facebook aux sorties de ladite rencontre, le Président a déclaré s’être “intéressé au sujet, convaincu que de nombreuses femmes béninoises, dans le cadre de leur travail, peuvent être sujettes à ces pratiques répréhensibles. » . Il a renchéri en martelant la nécessité «d’offrir les conditions idoines aux victimes afin qu’elles puissent se faire entendre, dénoncer leurs bourreaux pour que justice leur soit faite. C'est pourquoi le Gouvernement ne manquera pas d'engager des actions hardies en vue d’assurer une meilleure protection aux femmes afin de les encourager à briser la loi de l'omerta. ».

C’est dire que le Président de la République s’est engagé dans le combat contre le harcèlement en milieu de travail, tout comme il l’a fait contre la corruption et les pourboires dans l’administration publique. Et c’est bien à propos ! En effet, le harcèlement sexuel peut se produire dans n'importe quel milieu de travail, d'une usine à un bureau, d’un magasin à une école, dans le commerce comme dans les institutions internationales. En conséquence,  le harcèlement peut  empêcher les victimes de gagner leur vie, de faire leur travail efficacement ou d’atteindre leur plein potentiel et leur vision.

En fait, le président Patrice Talon s’est rendu compte que le dispositif législatif mis en place, notamment les lois 2006-19 du 17 juillet 2006 portant Répression du harcèlement sexuel et protection des Victimes en République du Bénin et n ° 2011-26 du 09 janvier 2012 portant prévention et Répression des violences Faites aux femmes, ne pourraient suffire pour endiguer le mal : il faut davantage son implication personnelle. Cet engagement doit être entendu comme une volonté plus forte de faire respecter les lois ci-dessus citées, et en conformité avec la Charte Africaine sur les Valeurs et les Principes du service public et de l’Administration que le Bénin a ratifiée le 28 mars 2019. Ladite Charte fait l’obligation aux Etats l’ayant ratifiée de promouvoir, entre autre le « professionnalisme et l’éthique dans le service public et l’administration » et à l’administration de « protéger ses agents contre toutes formes de menaces, d’insultes, de harcèlement ou d’agression » (Article 16 alinéa 2).

Dans ce cadre et loin des polémiques qui pèsent sur elle en ce qui concerne les questions de valeurs et d’éthique, l’administration béninoise doit pouvoir saisir l’opportunité de rendre plus durable et efficace, dans la mesure du possible, les actions de lutte contre le harcèlement en milieu du travail, du moins, dans la fonction publique. Pour ce faire, les pistes suivantes peuvent être explorées :

1- Rendre disponible un numéro vert d’appel pour recevoir, écouter, conseiller, orienter et soutenir les victimes de harcèlement et de violences qui peuvent garder leur anonymat ou volontairement décliner leur identité. Pour sécuriser la victime, une disposition doit pouvoir condamner sévèrement les agents de ces centres d’appels qui divulgueraient des informations ou se rendront auteurs des fuites d’information, alors que des enquêtes seraient en cours pour réprimer les auteurs. Les données personnelles des présumés auteurs et victimes devront être traitées suivant la loi n° 2009-09 portant protection des données à caractère personnel en République du Bénin ;

2- Elaborer ou faire revisiter le Code de valeurs, d’éthique et de bonne conduite de l’Administration béninoise qui énoncera les valeurs professionnelles, d’éthique, de bonne conduite et celles liées aux personnes ;

3- Installer, au sein de la Direction de l'Adminsiraton de chaque structure administrative centralisée, déconcentrée et décentralisée ainsi que dans chaque office public/parapublic, un «Service d’Ethique et déontologie administrative et professionnelle (SEDAP)»  dirigé par un responsable assermenté, formé et chargé de veiller à l’application stricte du Code de valeurs, d’éthique et de bonne conduite dans l’administration béninoise. Ce service se chargera, chaque année de faire un renforcement de capacité obligatoire pour tous les fonctionnaires de leur administration sur les questions de bonne conduite et d’éthique. Au quotidien, il recevra les plaintes des présumés victimes d’harcèlement et y apporter des solutions, dans la protection totale du/de la plaingant(e). Tous les SEDAP devront reporter au Secrétaire général de la présidence ou son adjoint désigné de manière périodique, avec copie au Ministre/autorité de tutelle, des manquements observés et des solutions apportées en temps opportun ;

4- Faciliter et assouplir les procédures de saisine des tribunaux de première instance en matière de harcèlement sexuel et moral avec la possibilité pour les victimes d’obtenir des décisions en référé, en raccourcissant les moyens, délais et procédures. 

La question du harcèlement n’est pas nouvelle, mais des mesures nouvelles plus institutionnalisées devront pouvoir déraciner le mal et promouvoir la bonne conduite dans nos administrations publiques. Et dans cette démarche, le président Patrice Talon a sûrement, à priori, le soutien de tous les agents publics consciencieux et des citoyens de ce pays !


Octavio Diogo est un juriste béninois dans la Diaspora africaine. Passionné des relations extérieures, des affaires politiques et du développement international, il a servi en diverses qualités, plusieurs missions diplomatiques multilatérales africaines et américaine avant de mettre ses compétences au profit de l’organisation intergouvernementale panafricaine. Il dirige actuellement l’ONG Weziza Afrika qui développe une expertise jeune dans les domaines de gouvernance, du genre et des Droits de l’Homme sur le continent.


17 février 2020

La question du Genre de manière fondamentale : Une revue des concepts

Par -Octavie Louisa
For the Enghlish verison, click here 
La notion générique que la plupart des gens ont, en ce qui concerne le Genre est que ce concept concerne uniquement les femmes. Or, le Genre est un concept unisexe. La confusion est souvent faite entre le genre et le sexe, même si elles sont deux théories totalement différentes.

De notre compréhension, le genre fait référence aux différents rôles et responsabilités des hommes et des femmes dans une société, en fonction de leur culture et des valeurs tandis que le «sexe» fait référence aux caractéristiques biologiques, l'apparence physique d'une fille ou un garçon.

Au cours des dernières décennies, le «Genre» a été considérée comme un outil obligatoire pour les organisations internationales, car elle aide les femmes à faire l’évaluation et le suivi de leurs capacités et compétences. Le Genre a également servi de référence pour aider les femmes à atteindre les objectifs de développement à travers l'objectif de parité, Ordre du jour des Organisations Internationales à l’instar de : l'Agenda 2063 de l’Union africaine  et  l’Agenda 2030 des Nations Unies pour le  développement durable.

Cependant, l’état d’esprit culturel du patriarcat, dont la plupart d'entre nous africaines, sommes victimes et devraient sortir, a donné naissance à un produit de socialisation qui suggère que « les filles sont naturellement inférieures aux garçons ». En outre, il a été prouvé que la plupart des traditions africaines emprisonnent la mentalité d’émergence, du développement et d’épanouissement des femmes et favorise ainsi l’inhibition de leurs capacités à être à l'avant-garde, sans stéréotypes. Dans la plupart des cas, les stéréotypes sont renforcés par la famille, l'école et le quartier, compte tenu du fait que les agents de socialisation tels que : les parents, les professeurs, les pasteurs, etc. influencent directement le comportement et les actes d'un enfant, ce qui contribue à perpétrer ce genre de stéréotypes envers les Femmes. L'appréciation du genre ne devrait en aucun cas être basée sur le sexe de l'enfant.

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L'intégration du concept "Genre"

L'intégration de la dimension Genre (Gender Mainstreaming) a été adoptée à l'échelle internationale à la fois comme une stratégie et un objectif vers la réalisation de l'égalité des sexes dans tous les secteurs et domaines de la vie. En d’autres termes, l'intégration d'une perspective sexospécifique a été adoptée à l'échelle internationale en tant que stratégie et objectif visant à réaliser l'égalité des sexes dans tous types de métiers et professions de la vie. De par sa définition lointaine, l'intégration de la dimension Genre est connue comme « un processus d'évaluation des implications pour les femmes et les hommes à toute action planifiée, y compris la législation, les politiques ou les programmes, dans tous les domaines et à tous les niveaux. Il s’agit d’une stratégie visant à intégrer les préoccupations et les expériences des femmes ainsi que des hommes, dans de la conception, la mise en œuvre, le suivi et l'évaluation des politiques et des programmes dans tous les domaines politiques, économiques et sociaux, afin que les femmes et les hommes bénéficient équitablement des opportunités et que, par conséquent,  l'inégalité ne se perpétue pas », Conseil économique et social des Nations Unies, 1977.

Dans la pratique, « le Gender Mainstreaming » est un outil actif d'équité pour permettre aux hommes et aux femmes d'exprimer librement leurs compétences sans discrimination ni parti pris. La plupart des organisations internationales et politiques, notamment l'Union Africaine et les Nations Unies, entre autres, ont fait des refontes profondes dans leur programme de travail, pour améliorer et promouvoir l'égalité des sexes et l'équité de Genre, dans leur domaine. Ainsi, la volonté des femmes et des hommes pour transformer l'Agenda en faveur de l'égalité des sexes, telle que la Stratégie de l'Union africaine pour l’Égalité entre les sexes et l'autonomisation des femmes(GEWE) en des actions concrètes, devient de plus en plus fructueuse. Toutefois, dans le processus d'aborder pleinement la question du genre, il y a une énorme nécessité d'éviter la « Cécité Genre » (Gender Blindness) qui consiste en la neutralité et la non-reconnaissance des rôles de genre et leurs implications dans toutes les sphères de la société.

L'intégration de la dimension Genre est non seulement sur les droits des femmes, mais  également sur liée aux devoirs des femmes, quant à leur capacité de prendre des responsabilités de l'apprentissage, de se former (en faisant des formations professionnelles du domaine dans lequel elles veulent travailler) et étant chercheuses d’opportunités. Les femmes devraient se réveiller et être responsables envers toutes ces lois qui leur donne du pouvoir dans le but de les élever et leur donner des possibilités d'être dans les sphères de prise de décisions et de contribuer à motiver et élever toutes celles qui s’attendent à atteindre le niveau de commandement.

Par conséquent, les réalisations et avancées concernant la dimension Genre, au cours des dernières années ont été et continuent d’être très significatives et encourageantes, mais il reste  encore beaucoup à faire. À cet égard, ce que nous voulons prioriser dans les années à venir,  est le rôle et l'implication totale des femmes, à jouer durablement leur rôle dans ce processus de développement et de l'autonomisation économique, parce que rien ne peut se faire que si les femmes elles-mêmes ne manifestent pas d'intérêt pour le développement de leur état d'esprit lié à cette question, dans la mesure où l'intégration de la dimension Genre a été institutionnalisée par la loi constitutionnelle de nombreux pays dans le monde. Les femmes peuvent alors profiter et exploiter les progrès, pour exprimer pleinement ce qu'elles sont capables de faire et de devenir.

Nonobstant, l'Architecture du Genre n’est pas une chose complexe et est autant profonde que ses racines. Cette architecture est une démarche, conduisant à la nécessité d’une prise en compte de nombreux éléments, visant à éviter la dichotomie, marquer une nette différenciation entre les concepts et les politiques utiles pour sa mise en œuvre effective dans tous les domaines.
En somme, les femmes devraient secouer les réalités afin de favoriser la lutte pour l’intégration de la dimension Genre, c’est-à-dire, de l'égalité des sexes, en créant une plateforme d'échange d'expériences sur les questions de genre, l'analyser par le biais de la méthodologie SWOT et trouver des solutions qui peuvent les aider à être associées au niveau supérieur de prise de décision. Ainsi, la spécification et la technicité du rôle prépondérant des femmes dans tous les domaines est réellement la clé de tous les processus de prise de décision.   


Octavie Louisa est experte en Gouvernance et en Intégration Régionale. Elle est passionnée des questions de droits de l’homme, genre, résolution des conflits, paix et sécurité humaine. Elle est la co-fondatrice de l’ONG Weziza Afrika dont elle dirige, en qualité de Directrice, l’Institut Weziza Afrika pour la Gouvernance et les Droits de l’Homme dont le mandat touche les questions thématiques de justice transitionnelle, le genre dans la paix et la sécurité, la résolution des conflits, la paix et la sécurité humaine.