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16 février 2023

Intégration africaine : Et si le Bénin ratifiait les Protocoles de l’UA sur la ZLECAf et la libre circulation des personnes ?

Cette semaine, plus de 55 Leaders et dirigeants d’Afrique se réuniront à Addis Abéba (Ethiopie), la capitale diplomatique et politique de l’Afrique dans le cadre de la 36ème Session ordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union Africaine. Cette session se tient à un moment crucial où le continent s’apprête à formuler son deuxième plan décennal pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, « l’Afrique que nous voulons ». Ce sommet revêt une importance vitale, dans la mesure où les dirigeants africains y trouveront l'occasion de renouveler leur engagement politique en faveur du progrès socioéconomique du continent, d'examiner les progrès réalisés et de convenir des prochaines étapes pour le faire rayonner sur la scène internationale.

De ce fait, le thème de l’Union Africaine pour l’année 2023 : « Accélérer la mise en œuvre de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine (ZLECAf) » n’en est pas anodin, car la ZLECAf constitue l’un des 15 projets phares de l’Agenda 2063. Si elle est rapidement et bien implémentée, elle pourrait à court, moyen et long terme, contribuer à résoudre les problèmes urgents de sécurité humaine, notamment la sécurité économique, de plus du milliard d’individus sur le continent. D’après les experts, avec la ZLECAf, le revenu réel du contient pourrait augmenter de 571 milliards de dollars supplémentaires, ce qui permettrait de créer 17,9 millions de nouveaux emplois et de sortir 50 millions de personnes de l'extrême pauvreté d'ici 2035.

Pour rappel, la ZLECAf est entrée en vigueur le 30 mai 2019 et le commerce sous ce régime avait déjà commencé depuis le 1er janvier 2021. Elle couvre non seulement le commerce des biens et des services, les investissements, les droits de propriété intellectuelle, mais aussi le commerce électronique (e-commerce). Le 7 octobre 2022, l'Initiative de commerce sous la ZLECAf a démarré avec 8 pays pilotes, dont le Cameroun, l'Égypte, le Kenya, le Ghana, l’Ile Maurice, la Tanzanie, la Tunisie et le Rwanda. C’est dans ce cadre que le Kenya a effectué son premier échange commercial avec le Ghana, afin de concrétiser la mise en œuvre du chemin vers l’industrialisation et l’accroissement du commerce intra-africain.

Toutefois, son effectivité, les Etats Africains devront massivement ratifier le Protocole de l’Union Africaine sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d'établissement, afin de booster la mobilité des populations sur le continent pour favoriser l’intégration régionale et le panafricanisme. A ce jour, seulement quatre pays à savoir le Rwanda, le Mali, le Niger et Sao Tomé et Principe ont ratifié ledit Protocole. Cependant, 11 autres pays, dont le Bénin qui n’a ratifié ni l’Accord établissant la ZLECAf, ni le Protocole sur la libre circulation des personnes. Ils devront alors emboiter le pas pour son entrée en vigueur et son effectivité dans les meilleurs délais.

Paradoxalement, d’après l'Indice d'ouverture des visas en Afrique 2022 (Visa Openness Index 2022), le Bénin est le pays "le plus ouvert/accessible en Afrique", grâce à l’exemption de visa pour 90 jours que le pays accorde, depuis 2017, à toute personne détentrice de passeport pays africains. Or, cette mesure constitue déjà la première phase de la mise en œuvre du Protocole de l’UA sur la libre circulation des personnes. C’est dire qu’en ratifiant les protocoles sur la ZLECAf et la Libre circulation des personnes, le Bénin ne fera que formaliser et conforter son leadership continental, parce qu’il est le premier et le seul à ce jour, à mettre en œuvre cette mesure de facilitation de la libre circulation des peuples africains.

Pour Madame Louisa Diogo,Experte en Gouvernance et Intégration régionale, et Directrice des Programmes et Orientations Stratégiques de l’ONG panafricaine RUSH Afrika, le Bénin a tout à gagner de la ratification tant de la ZLECAf que du Protocole de l’Union Africaine sur la libre circulation des personnes. L’optimisation des Zones Economiques Spéciales, dont celle de Glo-Djigbé, passe par son positionnement sur la chaine d’approvisionnement de la ZLECAf, comme un canal qui assurera aux populations de emplois décents, mieux rémunérés et de meilleure qualité. En ce qui concerne les salaires sous la ZLECAf, ils devront augmenter de 11,2 % pour les femmes et de 9,8 % pour les hommes d'ici à 2035. Avec une intégration profonde, le Bénin pourra attirer davantage d’investissements, stimuler le commerce et la croissance économique, réduire la pauvreté, accroître la prospérité partagée et garantir la sécurité humaine à la quasi-totalité de sa population. Enfin, la ratification de ces instruments constitue une opportunité pour le pays pour remodeler sa stratégie sécuritaire intérieure, aux différentes frontières (terrestres, aériennes, et maritimes), avec la contribution des populations, pour une optimisation de la sécurité de proximité.

C’est pourquoi, dans sa mission de plaidoyer pour la réalisation de l’Agenda 2063 et de promouvoir la sécurité humaine au Bénin et en Afrique, l’’ONG RUSH Afrika en appelle au gouvernement du Président Patrice Talon et aux Honorables députés de la 9ème législature de maintenir cet élan de leadership, en travaillant cette année, à la ratification de ces deux importants instruments qui vont impulser une nouvelle dynamique dans l’économie nationale, accroitre les échanges et les revenus et créer de l’emploi. Cela constituera sans nul doute, un actif important qu’ils laisseront aux générations futures.

Pour plus d’information, contactez l’ONG RUSH Afrika, www.rush-afrika.org

20 février 2020

Diplomatie: Comment le Bénin peine à "décrocher" des positionnements dans l'Union africaine


La semaine écoulée, une certaine presse locale béninoise a titré dans sa "une" que le Bénin aurait “décroché” un poste au sein du Conseil de Paix et de sécurité de l’Union africaine. Ce titre m’a fait un peu sourire quand j’imaginais comment la communication (j’ai fait un court séjour dans le monde de la communication) d'une telle annonce pourrait faire croire que mon pays avait réalisé un exploit ! J’ai alors jugé utile, à travers ce petit billet qui n’est soutenu par aucune raison politique, d’édifier ceux qui s’intéressent aux choses du monde diplomatique comme moi, sur les tenants et aboutissants. Une fois de plus, mon billet doit être vu comme un outil de renforcement de capacité sur le sujet, au regard de ma modeste expérience de 7 ans dans le monde politico-diplomatique d'Addis-Abéba d'où j'apprends chaque jour:

Non, le Bénin n’a vraiment rien « décroché » lors du sommet de l'UA.
"Avoir décroché quelque chose" suppose qu’on s’est battu pour cette chose, contre vents et marrés et qu’on ait pu l'obtenir quoique cela ne nous est pas, à priori, destiné. 
Ici, dans l’action diplomatique, «décrocher» signifierait que la diplomatie béninoise aurait  planifié, aurait nourri la vision, aurait engagé des actions de lobbying et de concertation constante et activé des accords bilatéraux avec des pays amis pour « parvenir » à être élu au Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’Union africaine.- Il n'en était pas le cas, puisque le siège au CPS nous revenait de droit, selon la rotation par pays par ordre alphabétique au sein de la région de l'Afrique de l'Ouest (par extension la CEDEAO). J’explique. 

La liste alphabétique des pays de notre région commence par le Bénin. Les ambassadeurs de la CEDEAO devraient, au moyen des concertations, s’entendre pour choisir 4 Etats membres pour siéger au CPS: l’un pour un mandat de 3 ans et les 3 autres pour un mandat de 2 ans, bien sûr, renouvelables.

Ainsi, depuis sa création en 2004, tous les Etats de la CEDEAO venaient en 2019 de boucler chacun deux mandats de 2 ans (2008-2012 pour le Bénin), à l’exception du Nigéria qui a cumulé près de 14 ans. Par conséquent, on reprend la liste par le premier pays par ordre alphabétique, d’où la désignation automatique et sans procès du Bénin! Donc, notre pays ne pouvait  ne pas siéger au CPS à compter du 1er avril 2020 !
Par conte, on pourrait qualifier d’exploit, la désignation du Bénin pour un mandat de 3 ans, ce qui ne fut pas  le cas.

Que fait alors la diplomatie béninoise en Afrique - pour les béninois?
Du point de vue de positionnement des béninois (et Dieu sait que nous avons des cadres de par le monde), je suis tenté de dire « RIEN ».
A la date d’aujourd’hui, le BENIN n’a officiellement aucun poste dans la sphère de l’UA. 
Tenez juste les statistiques suivantes- Le pays n’a aucun de ses citoyens :
  • parmi les 10 membres de la Commission de l’UA - CUA (Président, Vice-président et 8 commissaires),
  • parmi les 8 directeurs de département que comporte la CUA,
  • parmi les 15 Directeurs centraux de la CUA,
  • parmi les 13 Conseillers au service du Président et du Vice-président de la  CUA,
  • parmi les 7 Représentants permanents de la CUA auprès des institutions internationales/régionales basées à New York (USA), Bruxelles (Belgique), Genève (Suisse),  Beijing (Chine), Caire (Egypt.), Lilongwe (Malawi),
  • parmi les 13 Représentants spéciaux, Chefs de Bureau de Liaison de la CUA,
  • parmi les 9 Hauts représentants de l'UA,
  • parmi les 4 Envoyés spéciaux du Président de la CUA,,
  • parmi les 7 Représentants Spéciaux du Président de la CUA.

Au total, si mes calculs sont bons, AUCUN des 86 hauts fonctionnaires politiques de l’Union africaine n’est béninois.

C’est la faute à qui? Ne me demandez pas, parce que moi–même je cherche encore la réponse. Pourtant, le Bénin fait partie des premiers Etats à mettre en œuvre la mesure de 0.2 % de taxe sur les importations éligibles destinée à financer l’Union africaine, et notre pays honore ses engagements financiers vis-à-vis de l'Union! Alors, comment la Diplomatie béninoise n’arrive pas à rentabiliser les 220.518,76 dollars américains (soit environ plus de 122 millions de francs CFA) que le pays paiera en 2020 à titre de contribution, une somme qui sera mobilisée sur les impôts du contribuable national ?

Pire (ou mieux encore), à l’heure où nous écrivons,
  • le  Bénin n’est ni membre de bureau, ni simple membre d'un des 4 comités ministériels au niveau du Conseil Exécutif de l’UA,
  • aucun ministre béninois n’est membre de bureaux des 14 Comités techniques spécialisés (CTS) de l'UA, comités qui rassemblent les ministres sectoriels,
  • le Bénin n’est membre d’aucun bureau des 11 sous-comités du Comité des représentants permanents (COREP), c’est-à-dire, l’Union africaine au niveau ambassadorial, alors même que le Mali, le Burundi et le Congo sont dans plusieurs bureaux à la fois. Est-ce une question de masse de la contribution au budget de l’Union africaine ? NON, le Bénin contribue  plus que le Burundi, par exemple.
  • Le Bénin N’ABRITE AUCUN des 30 Organes ou Institutions spécialisées ni Bureau de liaison de l’Union africaine, pour qu’au moins des nationaux puissent occuper des postes, tout au moins d’exécutants. A considérer que l'acceuil d'un organe est relativement couteux pour l'Etat, sur le long terme, cela contribue à faire tourner l'économie locale avec des réserves étrangères. Si non, comment compendre que des pays comme l'Ethiopie, le Kenya, le Cameroun, l'Afrique du Sud, l'Algérie, etc... se battent à chaque occasion pour recevoir sur leur territoire, les institutions de l'UA?
Et pourtant, notre pays a démontré son panafricanisme en facilitant les procédures d'entrée des frères africains sur son territoire "sans visa", faisant de lui le 1er pays le plus ouvert aux africains. 

Convenez alors avec moi qu'il n’en faut pas plus pour que le Président Patrice Talon soit désigné « Champion sur la libre circulation des personnes » et inciter la création, pour le présider, d'un Comité de Haut niveau pour la libre circulation des personnes en Afrique, dans le but de réaliser les aspirations de l’Agenda 2063 y relatives. 

Tout béninois, dans la diaspora pourrait, s’il en est investi autrement, devenir un puissant outil dans la main de la diplomatie. Seulement, que la voie soit tracée par le Chef de la Diplomatie ! Nous sommes au service de notre cher pays que nous voudrions voir briller davantage. Rien d’autre !!!