Au cours de sa première et récente visite d’état au Rwanda, au lendemain de sa participation au
TICAD en Nairobi, le Président de la République Mr. Patrice Talon a annoncé son
intention de faire supprimer le visa d’entrée sur le territoire béninois aux
ressortissants des pays africains. A
peine annoncée par le Président Talon, et diffusée par la cellule de
Communication du Chef d’Etat du pays hôte, la nouvelle a fait le tour du monde et a été diversement
analysée par les compatriotes béninois suivant plusieurs angles. Certains ont
tôt fait de craindre, à juste titre, pour la sécurité
nationale et celle des frontalières déjà éprouvées, d’autres pour des questions
de sécurisation de leur emploi, d’autres encore pour celles relatives à un éventuel "surpeuplement" du
pays, vu la promiscuité du voisin de l’Est. Mais encore, certains nationaux
craignent que le Président Talon n’emboite le pas de son prédécesseur, Yayi
Boni, qui disent-ils, était passé maitre dans l’art d'annonces tout-azimuts de mesures sans accompagnement, parfois
prises sur un coup de l’émotion. Quoiqu’il en soit, il convient de s’attarder
sur les bénéfices d’une telle mesure qui n’est pas sans conséquences majeures
sur la gouvernance politique, économique et sociale de l’ex-Dahomey.
Tous droits réservés à l'auteur de la photographie. (boell.de) |
La mesure en elle-même et
ses options
D’après l’annonce faite, il s’agirait d’une suppression du
visa d’entrée, sans qu'il ne soit précisé s'il s'agit d'une suppression pure et simple. AInsi, le gouvernement devra alors procéder à une nuance nécessaire
pour éviter la confusion. Plusieurs options se présentent.
1. La première option, c’est que les bénéficiaires de la mesure prennent un visa à l’arrivée
qui pourrait toujours être payant, comme c’est le cas au Rwanda. De ce fait, il s’agira d’un visa payant mais sans procédure administrative préalable et
décourageante depuis le pays d'origine ou de résidence.
2. La deuxième option pourrait être de rendre le visa non payant,
ce qui reviendrait à renoncer alors à la manne
d’argent (officielle) qui découle jusque là des passages des étrangères aux frontières
béninoises.
3. La troisième option reste que le visa gratuit ne pourrait s'appliquer uniquement que pour les passagers entrant dans le pays par l'aéroport International Cardinal Bernardin Gantin et excluant les autres frontières.
3. La troisième option reste que le visa gratuit ne pourrait s'appliquer uniquement que pour les passagers entrant dans le pays par l'aéroport International Cardinal Bernardin Gantin et excluant les autres frontières.
4. La quatrième option pourrait alors être un visa d’entrée gratuit mais soumis à
une obligation, sans appel, de procéder aux formalités administratives nécessairement payante (voire
onéreuse) pour les séjours dépassant 30 jours, comme c’est le cas au Ghana
(et au Rwanda).
Sur l’effectivité de la
mesure
Etant donné que la mesure n’est point d'application immédiate, elle devra être entérinée par décret pris en conseil des
ministres et assorti d'u un délai de mise en vigueur, puis circulée officiellement par voies diplomatiques et autres aux pays concernés. Cela pourra permettre au
gouvernement de différer, par exemple, la mesure au 1er Janvier 2017 ou même 1er
février 2017; ce qui laissera à l’exécutif de peaufiner certaines mesures
collatérales allant dans le sens ou facilitant sa mise en œuvre.
Le Parlement devrait-il être
préalablement consulté ?
D’après certains citoyens, l’Assemblée Nationale devrait être préalablement
consultée avant meme une annonce. Au sens de l’article 98 de la Constitution en vigueur, toutes
les questions non traitées par l’Assemblée Nationale sont d’office du ressort
de l’exécutif. Ainsi le gouvernement peut, de mon avis, prendre la mesure sans consulter le parlement. Mais ce dernier devra suivre avec minutie les incidences d'une telle mesure sur la loi des finances. De toutes les manières, cette question reste ouverte et l'opposition, si elle existe encore,
est appelée à éclairer l’opinion publique. En cas de conflit, la Cour constitutionnelle pourrait être appelée à se prononcer sur l’opportunité ou non d’une loi.
Quels défis et opportunités présente lasite mesure? Ce sera l'objet d'un de nos tout prochains articles.
Octavio Hermeland Diogo