01 septembre 2016

Mesure de suppression de visa aux pays africains: Les options ouvertes au Bénin


Au cours de sa première et récente visite d’état au Rwanda, au lendemain de sa participation au TICAD en Nairobi, le Président de la République Mr. Patrice Talon a annoncé son intention de faire supprimer le visa d’entrée sur le territoire béninois aux ressortissants des pays africains.  A peine annoncée par le Président Talon, et diffusée par la cellule de Communication du Chef d’Etat du pays hôte, la nouvelle a fait le tour du monde et a été diversement analysée par les compatriotes béninois suivant plusieurs angles. Certains ont tôt fait de craindre, à juste titre, pour la  sécurité nationale et celle des frontalières déjà éprouvées, d’autres pour des questions de sécurisation de leur emploi, d’autres encore pour celles relatives à un éventuel "surpeuplement" du pays, vu la promiscuité du voisin de l’Est. Mais encore, certains nationaux craignent que le Président Talon n’emboite le pas de son prédécesseur, Yayi Boni, qui disent-ils, était passé maitre dans l’art d'annonces tout-azimuts de mesures sans accompagnement, parfois prises sur un coup de l’émotion. Quoiqu’il en soit, il convient de s’attarder sur les bénéfices d’une telle mesure qui n’est pas sans conséquences majeures sur la gouvernance politique, économique et sociale de l’ex-Dahomey.  

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La mesure en elle-même et ses options
D’après l’annonce faite, il s’agirait d’une suppression du visa d’entrée, sans qu'il ne soit précisé s'il s'agit d'une suppression pure et simple. AInsi, le gouvernement devra alors procéder à une nuance nécessaire pour éviter la confusion. Plusieurs options se présentent. 
1. La première option, c’est que les bénéficiaires de la mesure prennent un visa à l’arrivée qui pourrait toujours être payant, comme c’est le cas au Rwanda. De ce fait, il s’agira d’un visa payant mais sans procédure administrative préalable et décourageante depuis le pays d'origine ou de résidence.
2. La deuxième option pourrait être de rendre le visa non payant, ce qui reviendrait à renoncer alors à  la manne d’argent (officielle) qui découle jusque là des passages des étrangères aux frontières béninoises.
3. La troisième option reste que le visa gratuit ne pourrait s'appliquer uniquement que pour les passagers entrant dans le pays par l'aéroport International Cardinal Bernardin Gantin et excluant les autres frontières.
4. La quatrième option pourrait alors être un visa d’entrée gratuit mais soumis à une obligation, sans appel, de procéder aux formalités administratives nécessairement payante (voire onéreuse) pour les séjours dépassant 30 jours, comme c’est le cas au Ghana (et au Rwanda). 


Sur l’effectivité de la mesure
Etant donné que la mesure n’est point d'application immédiate, elle devra être entérinée par décret pris en conseil des ministres et assorti d'u un délai de mise en vigueur, puis circulée officiellement par voies diplomatiques et autres aux pays concernés.  Cela pourra permettre au gouvernement de différer, par exemple, la mesure au 1er Janvier 2017 ou même 1er février 2017; ce qui laissera à l’exécutif de peaufiner certaines mesures collatérales allant dans le sens ou facilitant sa mise en œuvre.


Le Parlement devrait-il être préalablement consulté ?
D’après certains citoyens, l’Assemblée Nationale devrait être préalablement consultée avant meme une annonce. Au sens de l’article 98 de la Constitution en vigueur, toutes les questions non traitées par l’Assemblée Nationale sont d’office du ressort de l’exécutif. Ainsi le gouvernement peut, de mon avis, prendre la mesure sans consulter le parlement. Mais ce dernier devra suivre avec minutie les incidences d'une telle mesure sur la loi des finances. De toutes les manières, cette question reste ouverte et l'opposition, si elle existe encore, est appelée à éclairer l’opinion publique. En cas de conflit, la Cour constitutionnelle pourrait être appelée à se prononcer sur l’opportunité ou non d’une loi.  

Quels défis et opportunités présente lasite mesure? Ce sera l'objet d'un de nos tout prochains articles.

Octavio Hermeland Diogo