07 avril 2016

#Bénin: Les non-dits du 1er gouvernement de Patrice Talon

Au soir de son investiture le 06 Avril 2016 et conformément à la constitution du 11 décembre 1990, le Président Patrice Talon a levé un coin de voile sur la composition de son gouvernement, tel que promis. Sans qu'il soit important de rappeler ici la composition, on pourrait néanmoins relever parmis les 21 membres, la présence d'anciens ministres du feu président Mathieu Kérékou, d'anciens ministres du désormais ancien président Boni Yayi, de nouvelles têtes issues de la diaspora, et 3 femmes. Sans surprises, l'équipe gouvernementale n'a point tenu compte ni de la parité homme-femme, ni de la représentation régionale du pays et ne comporte aucun poste qui pourrait faire l'objet de discussion sur sa constitutionnalité ou non (je veux parler de poste de Premier Ministre). S'il faut saluer le génie du président Talon pour avoir pu "caser" les Titans que sont Abdoulaye Bio Tchané et Pascal Irenée Koupaki dont les états-majors se disputaient les places de pilier du gouvernement, il ne fait l'ombre d'aucun doute que le Ministre Sehouéto a été  requinqué, fait ministre 10 ans qu'il ait occupé une position pareille et Barnabé Dassigli rappeler aux affaires après ses longues vacances sur le devant de la scène.



Talon sur les pas de Yayi?
Pendant que beaucoup l'attendaient pour êre faite aux environs de 16h, l'annonce tardive du gouvernement peut faire rappeler Yayi Boni en 2006 qui fit pareille. Serait-ce pour garder le suspens longtemps ou pour paufiner la liste? Toujours est -il que la procédure de l'avis consultatif du Bureau de l'Assemblée Nationale devrait être respectée après que la fête de la célébration de l'investiture soit terminée. Autre aspect, c'est la taille relativement moyenne de l'équipe. On pourrait se rappeler que Yayi avait passé de gouvernements de 23/24 membres à 31, puis, avec la présence d'un Premier Ministre. Mais pour Talon, nous n'en sommes pas encore là. De toute façon, il pourrait recevoir la pression de la "vaste" majorité présidentielle en composant son second gouvernement, propablement en décembre 2018/janvier 2019, ou plus tôt selon l'enjeu et les développements politiques. Mais, quels sont les non-dits de l'équipe Talon?

Les plausibles non-dits de la composition du 1er gouvernement de Talon
Comment pourrait-on interpreter la  présence de Candide Azanai, acteur majeur de l'historique "K.O" de 2006, de Sacca Lafia et de Lazare Sèhouéto? Avant tout propos, il faut rappeler quelques principes clés au système Talon: (1) On ne peut pas rejeter l'expérience d'éminentes personnalités qualifiées dans leur domaine d'activité, pour le seul motif qu'on ne veut plus "prendre les mêmes et recommencer" et cela, le désormais Ministre Candide Azannaï l'avait rappelé. (2) La notion de technocracité ou de "l'homme qu'il faut à la place qu'il faut" ne peut ou ne doit nullement signifier qu'un médecin ne peut bien assumer le département ministériel des affaires étrangères par exemple! Et le cas Nassirou Arifari Bako, géographe n'a pas démérité à son ancien portefeuille des affaires étrangères! Maintenant les non-dits.

1- Candide Azannaï, Minsitre délégué chargé de la Défense. Sa présence doit être vue sous plusieurs angles. (1) HOMME DE MAIN: Ledit ministère doit être dirigé par un homme de main, et le philosophe "moraliste" en est bien un, pour avoir été le directeur de campagne. La tâche que lui incombe son poste, demanderait qu'avoir une dialogue franc avec les forces armées, nourri par son expérience. Ce positionnement s'assimilerait à celui de Sévérin Adjovi, commerçant de son état, qui occupa ce poste sous Kérékou en 1996, sans être de la grande muette et qui marqua son passage.  Même si le scandale des treillis militaires l'éclaboussa, il en demeure pas moins, selon mes informations, que les militaires furent satisfaits de son administration en général.  (2) REFORME: On se rappelle bien, lors de son débat télévisé, en prélude au second tour, le Candidat Patrice Talon avait émis le voeu de "Transformer" le role de l'Armée pour devenir plus republicain et plus focalisé sur la sécurité des personnes aux cotés de la police nationale. Et pour cela, celui qui porte plus le projet de société, après le candidat même, est bel et bien le philosophe. (3) ROLE POLITIQUE: En étant relativement le plus "délégué" de tous, Candide Azannaï aura une vue sur la MAJORITE PRESIDENTIELLE qu'il pourrait diriger bientôt avec son expérience et, surtout, parce qu'il était le premier, sinon l'un des premiers, à croire en la candidature de Talon.

2- L'entrée de Lazare Sèhouéto se justifierait par le seul fait qu'il a été pratiquement le seul dans l'Union fait la Nation à avoir mouillé le maillot pour Talon. Sa mission dans l'équipe serait de devenir le pilote politique de Talon dans les Zou-Collines à partir de Djidja pour annexer toutes les zones non acquises directement à Talon et appartenant aux autres alliés de la coalition Rupture. Cela pourrait dire qu'à l'heure actuelle, Patrice Talon prépare une autonomie face à ladite coalition afin d'assurer une majorité écrasante pour les élections législatives de 2019. Et pour ce faire, Barnabé Dassigli, Ancien Préfet de l'Atlantique et du Littoral et redoutable concurrent de Valentin Aditi Houdé, se chargera du sud et Sacca Lafia sera le pion dans le Nord appuyé par Modeste Kérékou et autres. Mais au delà de l'aspect politique, Lazare Sèhouéto a bien d'expérience à faire valoir pour avoir déjà occupé le poste sous Kérékou.

3- Nomination de Joseph Djogbénou au Ministère de la Justice: La possible erreur de Talon? Voici bien une question qui mérite réflexion! Cela pourrait bien être une gravissime erreur pour plusieurs raisons: (1) Bien que l'homme soit de la maison justice, il y a de forte chance que la guerre entre la magistrature et un ministre-Avocat, connue au temps de Marie-Elise Gbedo, continue. (2) L'homme est l'avocat personnel de Talon. Non seulement il y a ici un sérieux conflict d'intérêt  mais aussi sa nomination pourrait signifier que Patrice voudrait faire vider ses affaires et procéder à l'exécution des décisions de justice en sa faveur et en faveur de ses entreprises en procès contre l'état. Et si cela est le cas, le chantre du Nouveau départ vient de commettre une erreur monumentale qui va à l'encontre de la morale et de l'éthique! Et toute personne qualifiée pourra saisir la Cour Constitutionnelle pour se prononcer sur la question! Plus encore, sur le terrain, la résistance des magistrats pourrait avoir lieu ou s'accentuer pour se muer en grève perlée.
Par contre, si le Ministre-Professeur-Avocat-Député-Président d'Alternative Citoyenne-Ancien Président de la FNEB, etc... Joseph Djognenou s'occupe plus de l'aspect Législation, on pourrait voir son positionnement comme étant la volonté manifeste du Président de faire l'exquisse des reformes, sous la coupole de Djogbénou et les faire adopter par la majorité qu'il se fera à l'Assemblée Nationale. Et plus précisement, la réforme constitutionnelle devant passer par voie référendaire, l'appui politique et concerté de Azannaï, de Sèhouéto, Sacca Lafia, Dassigli sera plus que nécessaire.

3- Je pense, pour ma part, qu'il n'est point besoin de s'attarder sur la nomination des Ministres Dassigli (expérimenté dans les affaires de gouvernance locale), Abdoulaye Bio Tchané (un expert des institutions financières des Nations Unies et de la BAD), Pascal Irenée Koupaki (un administrateur fin qui a connaissance des grands dossiers de la république), Adidjatou Mathys (une administratrice aussi mais dont la nomination s'apparente à un remerciement pur et simple) et Alassane Seidou (un practicien de la santé, quoiqu'un practicien ne fait pas toujours bon administreur des questions sanitaires).

4- Quant aux nouveaux venus qui ont dans leur rang des étrangers à l'admnistration béninoise, il faudra que le Président Patrice Talon s'assure de les faire assister (DC et SG) par des ressources locales qualifiées. Il convient de saluer l'arrivée des Ministres des Finances Romuald WADAGNI ( un diplomé de Havard qui pourrait faire la fierté de la jeunesse et relever les finances, et défier les coutumiers banquiers de la BCEAO qui ont occupé le poste sous Yayi), Aurelien Agbénonci (connu dans le système des Nations Unies pour son expérience dans la diplomatie du développement) et de Oswald Homeky (actuel Ministre de la Jeunesse, un porte-flambeau de la jeunesse de Cotonou, que nous espérons voir plaider pour l'application pure et simple de la charte africaine de la jeunesse, ratifiée par le Bénin, pour le bien de toute la jeunesse).

5- Du reste, on devra attendre de voir chacun à l'oeuvre avec l'objectif de nous embarquer pour du vrai nouveau départ.

Dieu bénisse le Bénin!